Quand on est mélomane, c’est pour la vie et dans tous les moments de la vie. Sous la douche, en passant l’aspirateur, en voiture… Bref comme le chantait Michel, on fait tout en chantant. Mais même quand on est mélomane, on n’est pas forcément une Montserrat Caballé toute en puissance et délicatesse, ni même garanti d’avoir un brin de voix digne des compagnons de la chanson en caleçon.
Et pourtant s’imaginer sur une scène plongée dans le noir, la lumière qui lentement dévoile ton corps à travers les brumes des fumigènes, c’est quand même plus fun que de se retrouver un balai à la main, reprenant à tue-tête « I want to break free », dans le salon de mamie après la dinde à Noël. Et là on se dit qu’on a un sacré bol, parce que mamie, elle n’a pas vu le clip à la télé, et trouve que la chanson est drôlement chouette, même sans aspirateur et surtout sans sonotone. C’est drôlement chouette une mamie.
Parce que Calamity, quand elle chante, a une voix qui n’appartient à personne, et surtout dont personne ne veut, il faut bien l’avouer. Pourtant quand elle est avec ses oiseaux, quelques adeptes du fétichisme vocal lui trouvent une voix d’ASMR ( c’est moins tordu que les fétichistes des pieds, même si j’ai aussi de très jolis orteils, si, si ).
Alors un jour à l’école des formateurs des réparateurs d’ailes, on lui annonce un matin :
- Allez hop tout le monde dans la grande salle avec le piano. On va constituer les groupes pour la chorale et les cours de chant.
Bon là il faut avouer que Calamity elle a eu un peu les chocottes. Sa dernière expérience dans une chorale au collège s’était soldée par un licenciement sans préavis. Au motif qu’elle ne respectait pas le tempo. La jalousie n’a pas de limite.
Voilà donc tout ce petit monde agglutiné, serré les uns contre les autres au centre. Et chacun son tour il faut s’approcher du piano. La grande brune autoritaire joue une note, l’apprenant reproduit et se trouve propulsé dans un des coins de la salle : alto, soprano,….Tout va très vite. Gauche, droite, centre…
Allez Calamity, haut les cœurs, tout va bien se passer !
La même mécanique, le même processus : sckinlg ! Calamity tente un son.
Et là avec la détente d’un ressort parfaitement huilé, la grande brune se retourne :
- Hum, hum, fais attention. Je refais la note.
Re sckling ! Re tentative de Calamity. Bon cette fois la brune semble inquiète.
- On le refait une dernière fois, tu te concentres un peu ?
Re Re sckling ! Re re tentative de Calamity. Intense réflexion de la pianiste.
- Hummmm, bon, ben mets toi….. euhhh…. Ben là.
Là ? C’est à dire ? Gauche ? Droite ?
- Ohhhh ben où tu veux hein, c’est comme tu le sens.
Encore cette jalousie. Depuis Calamity a réglé le problème. C’est vraiment pas son genre de vouloir faire de l’ombre à ses petits camarades.
- Tu viens chanter avec nous ? - Ohhh ça serait avec plaisir mais ça n’est pas ma tessiture.
Et hop !